L'école de Mademoiselle

Ce matin, Mesdemoiselles Estelle et Lucie me maquillent et me coiffent. Elles me conduisent dans le bureau de la surveillante principale, Mademoiselle Claudia. Elle est entourée de deux autres femmes, qu'elle me présente :

— Mademoiselle Corsélia De Gaches, Médecin et créatrice de corset anatomique.

Et Mademoiselle Bertine, qui dirige l'atelier de couture.

Je suis habillé en femme, hauts talons, maquillés, coiffés, et parfumés. Estelle m'a attaché les mains dans le dos. Je m'avance à petits pas vers le bureau. Claudia s'assied au centre, entourée des quatre femmes. Il n'y a plus de chaise. Je dois rester debout. Mademoiselle Claudia me demande de me tourner, et ensuite de marcher dans la pièce. Je suis intimidée. J'ai peur de ce qu'elles vont me dire, ce qu'elles décideront pour moi.

Je marche lentement, en principe, je suis à l'aise avec des talons de huit centimètres, mais je me méfie, et je marche avec précautions. Je ne veux pas décevoir Claudia, et je crains le jugement de ces quatre femmes.

Mademoiselle Claudia se tourne vers Mademoiselle Corsélia De Gaches, la créatrice du corset droit.

— Ma chérie, qu'en penses tu ?

— Elle est bien avancée depuis seulement deux semaines.

— Oui, il est très souple, il, elle a un bon potentiel. Je propose de continuer son entraînement, mais avec un trousseau plus adapté.

— Oui, certainement. Dit Corsélia, cela vaut la peine de lui préparer un corset sur mesure. Pour les robes, mademoiselle Bertine gère une garde-robe très importante.

Mademoiselle Bertine intervient.

— Il faudrait sans doute, prévenir Mademoiselle Blanche De Caylus de votre décision.

— Oui, bien sûr, elle sera prévenue, mais elle ne veut pas s'occuper des novices. Elle m'a demandé de présenter des candidates qui ont passé plus de trois mois d'entraînement. Uniquement une sélection des meilleures candidates. C'est la raison de cette réunion, sélectionner la meilleure candidate, et qui a un niveau suffisant pour comparaître devant Mademoiselle De Caylus.

— Vous avez d'autres candidates ?

— Deux novices sont arrivées récemment, mais ils ne sont pas du tout prêts. Impossible de les présenter. Je pense même les exclure de l'école. Les bons candidat(e)s sont très rares .

Mademoiselle Claudia se lève.

— Parfait, s'il n'y a pas d'objection, je propose de poursuivre son entraînement. J'espère pouvoir la présenter à Mademoiselle Blanche dans trois mois. Mais il faudra qu'elle soit parfaite, extrêmement féminine.

— Il reste une formalité. L'accord de Monsieur ... Machin...

Mademoiselle Claudia me demande :

— Vous avez le choix de poursuivre cet entraînement sous nos conditions, ou d'abandonner. Ce qui implique votre retour en prison.

Pas le retour dans cette prison ! Non, sûrement pas ! Ici, c'est bizarre, parfois dérangeant, gênant, mais au moins, je suis en sécurité et confortablement installé. Je réponds de suite.

— Je continue Mademoiselle.

— Parfait, signez le contrat s'il vous plaît.

Je signe, un peu à l'aveugle, je signe pour éviter la prison. Bizarrement, j'ai entendu ce qu'elles veulent de moi, mais je n'arrive pas à m'imaginer que c'est réel. J'ai sans doute signé un peu trop vite. Je veux éviter cette prison, me jeter à l'eau avant qu'elles ne changent d'avis.

J'ai signé. Je suis en attente. Il y a comme un moment suspendu. Immobile. Elles me regardent avec de légers sourires, comme un soulagement. Je sens que cet instant sera vite passé.