Avec Angélique, je recherche des annonces d'emploi. Je sens bien qu'il faut se bouger. Je suis certaine que l'on ne pourra pas rester dans cette maison sans rien faire, sans loyer. En ce moment, l'école est fermée pour la période de vacance. Mais à la rentrée, il nous faudra une occupation, un emploi. J'aurais aimé travailler pour l'école, mais avec les vacances, il ne reste que la directrice et quelques personnes à son service, La gardienne est à son poste, ainsi que deux jardiniers qui s'occupe de l'entretien courant.
La recherche dans les annonces ne donne pas grand-chose. Juste une proposition de serveuse dans un restaurant. C'est maigre, et je suis certaine que je pourrais trouver mieux. Après tout, j'ai le bac, et j'avais commencé des études universitaires, qui ont été interrompues par mon arrestation, et mon incarcération dans cette horrible prison.
Il me semble qu'Angélique est dans la même situation.
Le restaurant recherche deux serveuses. Pas d'autre proposition. Alors, Angélique leur téléphone pour un rendez-vous. Ce sera demain vers dix-sept heures, avant le premier service.
Le restaurant n'est pas très loin, juste avant le centre-ville. Je pense qu'a pied, trois quarts d'heure suffiront pour rejoindre le restaurant, mais je voulais profiter de notre sortie pour nous balader dans le centre-ville. Alors on se prépare pour partir vers deux heures de l'après-midi. Robe simple, maquillage conforme et coiffure soignée. Pas de parfum. Je crains que se parfumer dans un restaurant ne soit gênant.
Je préviens la gardienne pour l'inspection et nous ouvrir la grille.
À quatorze heures, Angélique et moi, on se présente à la gardienne. Pas de remarque pour la coiffure et le maquillage. La robe et les chaussures à talon sont acceptées. Par contre, on ne porte pas le bon corset. Elle ressort le document décrivant notre tenue, et nous fait remarquer que l'on doit porter un corset long. Il doit descendre au minimum à mi-cuisse.
Retour dans nos appartements. On sort les fameux corsets très longs et extrêmement rigides.
Angélique attrape la barre de laçage. J'actionne le treuil, et quand elle est suspendue, je commence à délacer son corset. J'agrafe son nouveau corset avec difficulté. Je ne suis pas habituée à faire cela. Le busc est long et très raide. Il faut que toutes les agrafes soient bien en place. Je commence son laçage comme je peux. Angélique me dit.
— Béatrice, tu n'y arriveras pas ainsi. Utilise le treuil à lacer.
— Oui ma chérie.
J'accroche les lacets. Le treuil est vraiment très efficace. C'est Angélique qui me demande d'arrêter de la serrer. Je finis en nouant les lacets et je baisse la barre. C'est à mon tour de me faire corseter. Angélique change mon corset et me lace très serrée. Il nous faut du temps pour être bien lacée. Et encore du temps pour remettre nos robes avec le corset qui nous bride. Retouche de maquillage et de coiffure. On est prêtes pour l'inspection.
La gardienne constate que tout est conforme et nous ouvre la grille. Il est plus de seize heures. Tout ce temps perdu. On a juste le temps d'arriver à notre rendez-vous. Mais on doit marcher aussi vite que possible. Un possible limité par nos talons hauts et notre corset qui nous bloque les cuisses.
Je suis essoufflée en rentrant dans le restaurant. Angélique me suit, elle aussi à bout de souffle.
Le patron du restaurant semble surpris en nous voyant. Il nous invite à s'asseoir pour discuter de notre embauche.
Angélique lui dit.
— Je suis désolée, Monsieur, mais on ne peut pas s'asseoir, ni se pencher.
— Vous ne voulez pas discuter ?
— Ho non, mais on porte un corset qui nous interdit de s'asseoir.
— Je ne comprends pas, comment faire le service si vous ne pouvez pas bouger. Vous avez déjà travaillé dans un restaurant.
— Non, mais on veut bien essayer.
— Vous serrez capables de porter quatre assiettes en même temps et servir à table ? J'ai des doutes. Et pour ce travail, votre tenue me semble inadaptée. Il faut vous attacher les cheveux. Je fournis un tablier pour le service. Il vous faudra également porter des chaussures plus pratiques et une jupe moins étroite. Le service doit être rapide.
Je me rends compte à quel point Angélique et moi, sommes inadaptée à ce travail. J'essaye d'intervenir dans le dialogue entre Angélique et le patron. Mais Angélique veut argumenter. C'est inutile. Ça ne peut pas marcher. Je dois tirer le bras d'Angélique pour qu'elle s'interrompe.
— Monsieur, je suis désolée.
Je m'adresse à Angélique.
— On n'est pas capable de faire ce travail. Inutile de faire perdre son temps à monsieur.
Le patron intervient.
— Votre amie à raison, vous ne pourrez pas faire ce travail. C'est bien dommage, vous avez une sacrée allure, mais il y a un service à assurer.
— Nous sommes désolées, merci de votre accueil. Bonne journée.
Et je pars, en entraînant Angélique qui hésite encore.
Le soir, Mademoiselle Claudia nous rend visite. On discute de nos recherches d'emploi. En fait pas grand-chose. Je lui parle de notre échec pour un emploi de serveuse. De notre tenue inadaptée, trop luxueuse, trop d'entraves et le corset long qui nous interdit le moindre travail physique.
— Il vous faudrait un travail sans activité physique, l'accueil dans un hôtel par exemple, ou du télétravail.
— mais il n'y a pas ce genre de travail dans les annonces.
— Je vais chercher dans mes relations. Dit Claudia.
— Je sais que Mademoiselle Corsélia à un projet de magasin ou d'atelier, mais ce n'est pas avant plusieurs mois.
Je demande.
— Et l'école ? Elle n'embauche pas ?
— Ho non. Pas durant les vacances, et à la rentrée tous les postes sont pourvut. Je ne compterais pas trop sur l'école pour un travail. Et puis quel genre de travail ?
Oui, quel genre. Avec nos contraintes, de corset, de talons très hauts et les robes étroites ou très larges. Mais jamais pratiques ou simples.
Mademoiselle Claudia, nous quitte en promettant de chercher dans ces relations quelque chose que l'on pourrait faire.
L'école de Mademoiselle II
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